Une œuvre érotique emblématique et sans cesse réécrite par son auteur.POUR UN PUBLIC AVERTI.
Justine ou Les Malheurs de la vertu, paru en 1791, est le premier ouvrage publié du vivant du marquis de Sade. Il s'agit en fait de la deuxième version du roman. Cet ouvrage clandestin connut un succès de scandale, des saisies et une spéculation en librairie, comme en attestent les 5 rééditions illégales publiées jusqu'en 1801. Le peu de tolérance à l'égard de ce roman libertin, pourtant exempt de vulgarité, s'explique surtout par la présence de scènes osées et la description de crimes immoraux.
Désireuse d'incarner la vertu, Justine doit finalement se résoudre à se comporter en libertine. Aux scènes d'orgies du roman se mêlent des dissertations philosophiques et des professions d'athéisme, des interrogations sur les notions de bien et de mal, la religion, la justice et la vertu.
Voici la deuxième version hautement transgressive d'un classique absolu de l'érotisme, où la vertu côtoie la luxure et l'irréligion.EXTRAIT
A ma bonne amie.
Oui, Constance, c’est à toi que, j’adresse cet ouvrage. A-la-fois l’exemple et l’honneur de ton sexe, réunissant à l’âme la plus sensible l’esprit le plus juste et le mieux éclairé, ce n’est qu’à toi qu’il appartient de connaître la douceur des larmes qu’arrache la vertu malheureuse. Détestant les sophismes du libertinage et de l’irréligion, les combattant sans cesse par tes actions et par tes actions et par tes discours, je ne crains point pour toi ceux qu’à nécessités dans ces mémoires le genre de personnages établis ; le cynisme de certains crayons (adoucis néanmoins autant qu’on a pu) ne t’effraiera pas davantage; c’est le vice qui, gémissant d’être dévoilé, crie au scandale aussitôt qu’on l’attaque. Le procès du Tartuffe fut fait par des bigots ; celui de Justine sera l’ouvrage des libertins, je les redoute peu : mes motifs dévoilés par toi n’en seront point désavoués ; ton opinion suffit à ma gloire, et je dois après t’avoir plu, ou plaire universellement, ou me consoler de toutes les censures.
Le dessein de ce roman (pas si roman que l’on croiroit) est nouveau sans doute ; l’ascendant de la vertu sur le vice, la récompense du bien, la punition du mal, voilà la marche ordinaire de tous les ouvrages de cette espèce ; ne devroit-on pas en être rebattu !
À PROPOS DE L'AUTEUR
Donatien Alphonse François de Sade, alias le
Marquis de Sade (1740-1814) est un homme de lettres, romancier et philosophe français. La quasi totalité de son œuvre exprime un athéisme anticlérical et est teintée d'érotisme – souvent lié à la violence et à la cruauté –, ce qui lui a valu de connaître des mises à l'index et la censure. Sur les 72 ans qu'a duré sa vie, le Marquis de Sade en a passé 27 derrière les barreaux. Occultée et clandestine pendant tout le XIXe siècle, son œuvre littéraire est réhabilitée au milieu du XXe siècle part Jean-Jacques Pauvert. Sa recon